Je croyais que j’y serai très sensible, à la nostalgie.
Quand mon premier enfant est né, moi qui ai tellement de mal à laisser partir les choses qui ne sont plus, je pensais que je serai très nostalgique de ces moments magiques passés avec mon tout petit.
Nostalgique de son odeur.
De ses babillements.
De son sourire.
De sa démarche vacillante.
De son élocution toute en rondeur.
De ses accomplissements.
Oui, au-delà des moments parfois difficiles de la parentalité, je croyais que la magie de ces instants me manquerait.
Sauf qu’en fait, non.
Les mois et les années ont passé, et la nostalgie n’est pas venue.
Parce qu’en fait, la magie, c’était lui.
Lui dans le moment présent.
Lui plus grand.
Et maintenant, des années plus tard, celui qui était si petit est devenu si grand.
Celui que je tenais au creux de mes bras m’entoure parfois des siens.
De mes trois bébés, plus aucun n’est petit.
Plus aucun ne babille ni ne vacille.
Un seul me laisse encore me noyer dans ses cheveux.
Mais toujours pas de nostalgie.
La magie, c’est eux. Eux plus grands, eux opposants, eux qui vont de l’avant.
C’est parfois rock’n roll, c’est parfois se faire renvoyer dans les cordes et avoir envie de faire de même.
Ce sont parfois des cris, des « je m’en fiche » et des mots pas très jolis.
Mais mes yeux pétillent de les voir si grands.
Je me délecte lorsqu’ils ont des choses à raconter.
Je m’émerveille de les voir être eux ; de n’être plus l’enfant qu’ils étaient, et pas encore l’adulte qu’ils seront.
Ils ne me laissent pas passer grand-chose, et aussi inconfortable que ce soit, j’aime les voir faire ça.
Ils me font rire, c’est comme une gourmandise.
Ils ont des ressources qui semblent n’appartenir qu’à eux, me rappelant que comme au début, je ne fais que leur tenir la main.
Comme un nouveau-né, ils portent toujours en eux le merveilleux du présent et un univers de possibles.
Je savoure ces moments où celui qui est encore enfant me prête ses cheveux pour m’y noyer, ses joues pour les embrasser, ses côtés pour y lire un livre. Je les savoure sans crainte.
Je ne peux pas être nostalgique d’eux.